mardi 15 novembre 2011

Goudemalion aux Arts Décoratifs : so far, so Goude !


Jean Paul Goude, l'homme du défilé du bicentenaire de la Révolution en 1989, fait l'objet d'une large rétrospective au Musée des Arts Décoratifs. Cette exposition retrace les quarante ans de carrière de cet "auteur d'images" inclassable et touche à tout. De ses dessins d'enfant, montrant déjà son don pour la narration par l'image, à ses dernières créations, on baigne dans l'univers atypique de Goude.

Accueilli par l'une des valseuses du bal du bicentenaire de la Révolution française, c'est justement cet évenément qui apparait le premier au visiteur puisqu'il est présenté dans la nef du Musée. On y découvre les détails et la génèse de ce défilé grandiose et novateur qui a marqué la mémoire des petits et des grands rivés devant leur poste de télévision ce soir de 14 juillet  1989 (ou dans les gradins pour les plus chanceux, mais ce n'était pas mon cas... Je me suis contenté de mon poste de télévision écran pas plat, coins pas carrés, pour reprendre les arguments de vente de l'époque...). Au milieu se trouve la grosse locomotive qui a remonté les Champs Elysées pour symboliser la révolution industrielle. Elle est entourée des clichés des costumes des régions de France et des pays associés qui composaient le défilé, avec les Britanniques marchant sous la pluie les Soviétiques (eh oui, nous ne sommes qu'en 1989) sous la neige. Ce défilé, que François Mitterrand et Jack Lang, alors Ministre de la culture, avaient voulu consacré à l'histoire de l'humanité et à la liberté plutôt que tourné vers la commémoration d'une période finalement relativement sombre de l'histoire de France, s'achevait sur l'image forte de Jessy Norman, enveloppée dans un immense drapeau tricolore chantant la Marseillaise place de la Concorde.
Les salles réparties autour de la nef retracent le parcours de Goude, en commençant par les dessins qu'il a réalisé enfant puis de ses première pub dans les années 60, pour Dim, Marie-Claire et Printemps. A ces premiers pas dans la pub succède sa collaboration avec le mythique magazine américain Esquire dont il devient le directeur artistique. De cette période New Yorkaise sont présentées des photographies de la fièvre festive de l'époque, de la folie disco, latino, gay, avec lesquelles il magnifie le sexe et la mixité.

Azzedine et Farida, Paris, 1985
Tirage photographique découpé et ruban adhésif
© Jean-Paul Goude
Mais le sujet phare du travail de Jean-Paul Goude, c'est le corps de la femme. L'ensemble des salles qui suivent sont consacrées aux photographies, films et compositions que lui ont inspiré ses égéries. En contractant Goude et Pygmalion, l'exposition traduit bien le travail sculpteur, de remodeleur du corps de la femme au moyen des images. De Radiah à Karen, en passant par Farida et bien sûr Grace, il allonge, raccourcit, blanchit, noircit les corps. Pour Grace Jones notamment, qui fut peut-être son modèle le plus iconique, sont montrés les procédés qui ont mis son corps en valeur, nu, allongé, blanchi ou mécanisé pour la publicité réalisée pour la CX2 de Citroën en 1987. Le découpage et la démultiplication des portions de clichés permettant de modifier, détail par détail les parties du corps de ses modèles (et de son propre corps, dans un autoportrait très valorisant !) sont fascinants.

Dans la galeries de droite, retraçant son travail pour la pub, rappelle à quel point il a fait de ce médium  a priori vulgaire un véritable art. Les publicités télévisuelles diffusées en boucle dans la salle sont toutes familières au visiteur le plus néophyte. Vanessa Paradis en oiseau en cage pour Chanel, les volets qui claquent sur fond de Prokofiev pour Chanel également, l'affrontement de la femme et du lion pour une bouteille de Perrier ou les enfants Kodak sont autant de petits films qui demeurent dans l'imaginaire collectif et qui appartiennent désormais à l'histoire de la télévision.


Les Galeries Lafayette : L’Homme, Paris, 2004
Collage
© Jean-Paul Goude

Plus récemment, les compositions réalisées pour la campagne d'affichage pour les Galeries Lafayette et côtoyées par tous les parisiens usagers du métro (pour parler en langage RATP...) montrent que Goude n'est toujours pas à cours d'idees et de créativité. Elles sont toutes rappelées dans la galerie de gauche, dédiée aux installations, par l'alignement d'écrans autour d'une salle, à raison d'une affiche par écran représentant par ailleurs chacun un quai d'une station de métro, parcourus en continu par une rame.

Cette rétrospective est donc extrêmement complète, fouillée et d'une grande qualité. Totalement inattendue pour un artiste encore très actif, mais réellement nécessaire, ne serait-ce que pour le plaisir de se rebaigner dans la folie chic et choc de ces dernières décennies.

Goudemalion
Du 11 novembre 2011 au 18 mars 2012


Musée des Arts Décoratifs
107 rue de Rivoli
75001 Paris
01 44 55 57 50
www.lesartsdecoratifs.fr


du mardi au dimanche de 11h à 18h, nocturne le jeudi jusqu'à 21h
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