dimanche 12 octobre 2014

Niki de Saint Phalle au Grand Palais

L'exposition Niki de Saint-Phalle est typiquement le genre d'exposition qui remplit les salles d'exposition de visiteurs. J'avais d'ailleurs pris soin de réserver mon billet à l'avance, m'imaginant le Grand Palais pris d’assaut. Même pas... Certes, il y avait quelque file d'attente, mais rien en comparaison de la folie que peuvent provoquer certaines grandes expositions comme Hopper l’année dernière. Pourtant, il y aurait plusieurs raison d'emballer les foules. Niki de Saint-Phalle s'exprimait de maniere plutot ludique et joyeuse et son feminisme est pile dans l'air du temps.

Tout au long du parcours, des photos de Niki de Saint Phalle, Niki pour Catherine Marie-Agnès, (pas facile à porter dans la vie de tous les jours) sont exposées en grand à coté de ses œuvres. C'est curieux de voir le visage de petite fille aux grands yeux a la Audrey Hepburn à coté de ses créations totalement déjantées. Elle était quand même complètement barrée la dame, et ça détonne un chouïa avec le physique de petite fille BSTR.

Les œuvres du début sont sans grand intérêt. Elle prend un peu de Jasper Johns, un peu de Jackson Pollock, les verse dans le saladier et remue bien avec la cuiller en bois pour donner des œuvres à mi-chemin entre les deux. Il est manifeste qu'elle se cherchait encore. Si elle était restée sur ce créneau, elle ne serait certainement pas parvenu à son niveau de célébrité. On y trouve toutefois un thème qui demeurera tout au long de sa vie et qui marie violence et jeu. Elle casse des jouets, elle embellit la mort et la disgrâce, elle explose les canons de la beauté occidentale.

Les nanas, les premières sculptures de grosses femmes en laine et en carton, apparaissent assez tôt dans la carrière de Saint Phalle et on se sent plus en terrain connu qu'auparavant. Les nanas, c'est un hit artistique, l’équivalent du bulldog de Julien Marinetti d'aujourd'hui, la sculpture qui garantit de trouver son public, qui se décline à l'envi et qui fait chauffer le tiroir-caisse. Avec ses couleurs et ses rondeurs, bien plus facile a habiller un intérieur qu'un Innocent X de Bacon. Alors, forcement, le filon sera exploite longtemps. Petite aparté, l'un des intérêts de cette expo est d'ailleurs la façon dont elle a exploité les liens entre art et société de consommation pour financer ses projets, comme le Jardin des Tarots en Toscane. Plus qu'une artiste, c'est un chef d'entreprise avec un modèle économique d'exploitation de ses talents.

Ce qui est amusant avec les nanas, c'est que Saint Phalle les utilise pour sous-tendre une idéologie féministe. Elles font penser aux Venus préhistoriques callipyges, ce qui, a priori, n’était pas une représentation libératrice de la femme mais plutôt qui la confortait dans l'image de pondeuse de mouflets. Avec Saint Phalle, justement, ces postérieurs généreux symbolisent l'affranchissement des canons de la beauté de l’époque. Cela résonne singulièrement avec le passe de mannequin de l'artiste. Les nanas reprennent ainsi le pouvoir, elles sont surdimensionnées pour en imposer aux hommes. De même, la fonction procréatrice de la femme est décomplexée pour être la quintessence de la création portée à son sommet, les hommes ne pouvant y prétendre. Certaines étaient gigantesques et exposées en extérieur, pour que tous puissent y avoir accès. C'est le cas de Hon, exposée en Suède et dans laquelle les visiteurs pouvaient pénétrer (le mot est méticuleusement choisi...).

La femme est portée aux nues par les nanas, mais elle en prend pour son grade avec les mères dévorantes. Les principes et les procédés sont les mêmes mais les sujets sont plus grinçants, moins joyeux et au final moins flatteurs pour les femmes. Les rondeurs sont tout de suite beaucoup moins avantageuses, bonjour les seins en gants de toilette et les culottes de cheval. 

L'exposition se termine sur l'autre objet de la célébrité de Niki de Saint Phalle, le tir à la carabine. Un nouveau moyen de lier jeu et violence et une utilisation subtile des médias par l'art. Le principe consistait à tirer à la carabine sur des tableaux ou des objets remplis de sachets de peinture et recouverts de plâtre blanc, le tout devant une camera. La création par la destruction. Le résultat est une œuvre unique dictée par le hasard, impossible a imiter, mais en toute honnêteté, au-delà du cote fun du tir, ce résultat en lui-même est quand même d'un intérêt limité. Elle a développée ce procédé en tirant sur des tableaux représentant la guerre ou les églises (je suis surprise que les gugusses de la manif pour tous ne se mettent pas a faire un sitting devant le Grand Palais). Elle aurait aussi pu en faire un avec Richard Clayderman, elle aurait pu tirer sur le pianiste...

Je me suis bien amusée, j'ai lu toutes les lettres dessinées étalées sur les murs, ai pris des couleurs plein les mirettes, mais bon... L'impression générale est qu’au-delà des aspects ludiques et provocateurs, j'ai eu du mal a y trouver de la profondeur.

Grand Palais
17 septembre 2014 - 2 février 2015
Tous les jours sauf le mardi
10h00 - 22h00 (20h00 les dimanche et lundi)
13 euros

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